« Notre histoire »

Tout baigne, les petits oiseaux volent ♥

« Il eut un temps où tout le monde était cloué au sol. Tous ces félins, condamnés à ramper par terre. Mais ça, c'était avant ♥ Un jour d'hiver, le plus rude que l'on ait jamais connu, la seule reine d'un clan mit bas un petit chaton, mignon à croquer, une femelle plus précisément. Le dernier espoir du clan. Espoir qui dura environ dix secondes. Une fois née, la petite s'ébroua avec difficulté, tenant à peine sur ses pattes. C'est à ce moment précis que se déployèrent ses ailes. Oui, des ailes. Une jolie petite paire d'ailes blanches comme son pelage. A partir de ce jour, tous, même sa mère, l'évitèrent. Au bout de quarte lunes d'incessants efforts pour se faire accepter, la jeune ailée comprit que tout ceci était vain. Elle se pencha dans l'eau de la mer, et repensa à tout. A sa courte enfance. A ses ailes. Elle les maudit une dernière fois en se jetant à l'eau.

Cependant, ce n'eut pas l'effet escompté. Ouvrant de grands yeux à la fois surpris, terrifiés et émerveillés, elle ouvrit la gueule et ... respira. Libre comme l'air, elle se mouvait dans l'eau comme à la surface, légère et rapide, tel un poisson dans l'eau ! Elle courut raconter l'incroyable évènement à son clan où, évidemment, personne ne la crut. Elle était déjà un monstre. Comment pouvait on monstrifier encore plus un monstre ? Impossible, tout bonnement impossible. Elle sut alors que, quoiqu'elle fasse, personne ne voudrait d'elle. Seulement, elle voulait vivre. Alors elle partit, devenant une solitaire.

Des lunes plus tard, elle était devenue une jolie chatte ailée que tous les clans fuyaient et rejetaient, mais elle ne le vivait pas si mal. Jusqu'au jour où elle le rencontra, lui, le chat ailé. Sa vie changea, s'emplit d'un bonheur jusqu'ici inconnu, qui s'amplifia lorsqu'ils eurent un enfant. Un petit chaton qui ne cessait de geindre, mais qui retrouva le sourire dès que sa mère l'eut sourit. Bien sur, ce chaton avait, lui aussi, une paire d'ailes aux plumes lisses et douces. Il grandit paisiblement, dans la joie, jusqu'à ses vingt lunes. Il n'avait rien pu vivre d'extraordinaire, à part lorsque son père le jeta à l'eau et qu'il crut mourir. La minute d'après, il nageait comme un dauphin ! A ses vingt lunes donc, quelque chose lui arriva. Lorsqu'il se réveilla ce jour là ... ses ailes avaient disparu. Horrifié, il alla voir ses parents, qui le réconfortèrent, mais trouvaient quand même ça étrange. Comment eut-il pu les perdre, alors qu'eux, du haut de leurs cinquante lunes, les avaient toujours ? Réellement bizarre. Ils finirent tous par accepter ce fait. Enfin, presque tous.

Un jour de pluie que ses parents s'envolaient dans leur grotte, il ne put les rejoindre. Ni une ni deux, ils décidèrent de le porter. Il refusa. De plus en plus bizarre, hein ? Ses parents, croyant en un petit caprice d'adolescent, essayèrent de le convaincre. Mais toute sa joie et sa candeur de petit chaton mignon avaient disparu avec ses ailes. Il baissa les yeux et s'enfuit. Durant des lunes, il se cacha de ses parents. La honte, c'était tout ce qu'il ressentait. Impuissant, il sauta à l'eau et se réfugia dans les profondeurs, où il vécut pour le reste de sa vie. »

« Mais comment s'est il reproduit, papa ? Et que faisons-nous ici alors ? L'histoire est finie ? »

« Oh non, elle est loin d'être finie. Mais ça t'ennuierait, j'en suis certain. Pour résumer ... certains félins en ont tout simplement eu assez de rester terré sous l'eau et ont décidé de revenir à terre. Nous en sommes les descendants. Tu comprends ? »

« Oui, papa. Mais alors, pourquoi y a pas de chats avec des ailes sous l'eau et sur terre ? Où ils sont, eux ? »

« Oh, eux. Tu sais, le jour de leurs vingt lunes, certains perdent leurs ailes. Ce n'est plus très rare maintenant, on dit que deux félins sur trois les perdent ce jour ci ! Nous en sommes, nous, des félins sans ailes. Nous pourrions aller vivre sous l'eau si nous le voulions. Néanmoins, l'accès au domaine des cieux nous est interdit. Tout en haut, là haut, dans les nuages. Le territoire des chats volants, où seuls eux peuvent aller. Le monde est mal fait fils. »

« Alors nous, nous sommes les malchanceux dans l'histoire. »

« Peut-être bien. A chacun ses malheurs. Mais jamais ne désespère. La roue tourne, mon fils. »

La roue tourne.

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